Lettrines ArboSciences

Ceci, Cela

L'Immuable (Sogyal Rinpoché, juillet 2021)

Par une contemplation continue & un constant entraînement au "lâcher prise", nous en viendrons à découvrir en nous-même "cela" que nous ne pouvons ni nommer, ni décrire, ni conceptualiser.

Nous commencerons alors à comprendre que "cela" est sous-jacent (qui ne se manifeste pas ouvertement, qui est caché) à tous les changements & à toutes les morts (pertes, souffrances) du monde.

Les désirs & les distractions limités auxquels nous avait condamnés notre quête avide de la permanence commenceront alors à perdre de leur force & à se détacher de nous.

Qui suis-je ? (Didier Weiss & Alain Eskenazi, juillet 2022

Ni ceci, ni cela

La question "Qui suis-je ?" de Ramana Maharshi renvoie à ce "Je" pur, ce "je suis" sans définition ni qualificatif et atemporel.

A partir du moment où il y a Conscience, cette Présence indicible (ineffable, indescriptible) au-delà des mots est là. Donc ce "Je" est naturel & omniprésent et n'a aucune relation avec un "Moi".

Cette méthode de l'analyse védique (langue des Véda, forme archaïque du sanskrit) par l'abnégation ("Je ne suis pas ce corps, car je vois bien que ce corps change en permanence" ou "Je ne suis ni ces pensées ni ces émotions qui vont & viennent") est un outil d'investigation précieux à utiliser de manière systématique en évitant soigneusement de laisser des pans inexplorés.

Cela

"Cela" est une flèche qui va dans la direction de "Ce que l'on est vraiment". Dans la formulation "Je suis cela" ("I am that", de Nisagadatta Maharaj) désigne ce vers qui on tend à être.

L'Inconnaissable selon Sri Aurobindo

Négation matérielle & refus ascétique

En Europe et en Inde, la négation matérialiste (le désintérêt pour les choses matérielles) et le refus ascétique (le désamour pour toute forme de culte) ont cherché à s'affirmer respectivement comme l'unique vérité et à imposer leur conception de la Vie.

De la différence dans les rapports de l'Esprit et de la Matière avec l'Inconnaissable, que tous deux représentent, résulte aussi une différence d'efficacité entre la négation matérielle et la négation spirituelle.

Les temps sont donc venus où le monde doit s'orienter vers une affirmation nouvelle et plus globale, dans le domaine de la pensée et dans celui de l'expérience intérieure et extérieure, et, par conséquent, vers de nouvelles et plus riches réalisations de soi dans une existence humaine intégrale, pour l'individu et pour l'humanité.

C'est Cela qui échappe à toute définition et à toute description, et qui pourtant est non seulement réel, mais accessible. Quelle que soit la voie que nous parcourions, Cela est toujours le terme auquel nous parvenons et nous ne pouvons y échapper qu'en refusant d'achever le voyage.

Réalité inconnaissable

Une certaine forme d'agnosticisme (admettre l'existence de l'Inconnaissable) est la vérité finale de toute connaissance. En effet, quel que soit le chemin, quand nous arrivons à son terme, l'univers ne nous apparaît plus que comme le symbole ou l'apparence d'une Réalité inconnaissable qui se traduit ici en différents systèmes de valeurs, valeurs physiques, vitales et sensorielles, valeurs intellectuelles, idéales, spirituelles.

Et plus Cela devient réel pour nous, plus Cela nous paraît transcender toute pensée et ses définitions, toute expression et ses formules. "Le Mental n'y atteint point, non plus que la parole". Cependant, de même qu'il est possible d'exagérer, avec les illusionnistes, l'irréalité de l'apparence, de même il est possible d'exagérer l'inconnaissabilité de l'Inconnaissable. Quand nous disons qu'Il est inconnaissable, nous voulons dire en réalité qu'Il ne peut être appréhendé par la pensée et le langage, instruments qui s'appuient toujours sur le sens de la différence et s'expriment au moyen de définitions; mais s'Il n'est pas connaissable par la pensée, Il peut être atteint par un suprême effort de la conscience.

Il y a même une certaine Connaissance par Identité qui, en un sens, permet de Le connaître. Cette Connaissance ne peut certes pas être traduite avec succès dans les termes de la pensée et du langage, mais quand nous l'avons atteinte, elle entraîne une réévaluation de Cela dans les symboles de notre conscience cosmique, couvrant non point un seul domaine mais toute l'étendue du champ symbolique. Cela produit une révolution de l'être intérieur qui, à son tour, produit une révolution dans notre vie extérieure.

L'Inconnu n'est pas l'Inconnaissable; il ne reste pour nous l'inconnu que si nous tenons à notre ignorance ou persistons dans nos premières limitations. Car à toutes les choses qui ne sont pas inconnaissables, à toutes les choses de l'univers, correspondent, dans cet univers, des facultés capables d'en prendre connaissance; et en l'homme, le microcosme, ces facultés existent toujours et, à un certain stade, peuvent être développées. Certes, nous pouvons choisir de ne pas les cultiver, et, là où elles le sont en partie, de les décourager et de leur imposer une sorte d'atrophie. Mais, fondamentalement, toute connaissance possible est une connaissance accessible à l'humanité.