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Basa Jaun ou Basa-jaun (Pays-Basque, France-Espagne)

Seigneur Sauvage (1875-1882)

Au Pays Basque Pays Basque, tant français France qu'espagnol Espagne, courent des légendes sur le “basa-jaun”, l'“Homme Sauvage” (ou plus exactement le “Seigneur Sauvage”) local.

Le Basa-jaun, (“sauvage-seigneur”), serait bien bâti, d'environ deux à trois mètres de hauteur; ses cheveux atteindraient ses genoux, il serait très agile, fort, velu, avec des caractéristiques animales.

Basa-Jaun ne diffère pas sensiblement d'une bête sauvage. Il est couvert de poils, comme un ours; il se nourrit d'herbes ou de gibier; il ne quitte pas les montagnes et les forêts; il est cruel, il est voleur. Il n'est pas sujet aux infirmités: il conserve toujours une force sans pareille; il est insensible aux intempéries des saisons; il marche jour et nuit.” (Cerquand 1875-1882).

“Celui que l'on surnomme homme de bouc est accusé de hanter les cabanes des bergers dans la montagne, où il vient se réchauffer près du feu, ou plus simplement dérober leur lait et leur fromage, tel un véritable parasite.” (Webster 1879).

“Dans divers contes, il est accusé d'enlever des femmes et de leur faire des petits qui sont d'une force peu commune et velus.” (Sébillot 1904-1907).

Cela nous rappelle la légende de Jean-de-l'Ours. Ajoutons qu'il semble posséder une longue chevelure (y compris Basa-Andere, sa femme), et que beaucoup de ses exploits se passent nuitamment.

Contes basques (1960)

Bien que ce personnage soit présent dans nombre de contes basques Pays Basque, il est considéré (ou était considéré récemment) comme un animal réel : que le “Goupil” du “Roman de Renart”, ainsi que les autres animaux de la forêt, parlent comme des hommes, ne signifie pas que le “renard”, le “Vulpes vulpes” des zoologues, n'existe pas !

Tout au contraire, une lecture zoologique (et particulièrement éthologique) de ce chef-d'œuvre moyenâgeux nous en dit long sur le comportement de cet animal : qu'il vit dans une tanière, qu'il est omnivore à dominante carnivore, qu'il est rusé au point de faire le mort, et cetera, et cetera ... et sur le plan anatomique qu'il doit ressembler à son “cousin” le loup (Canis lupus) “Ysengrin” , mais avec une toison rousse - toutes choses parfaitement exactes, et amplement démontrées depuis.

Ainsi donc, il y a deux siècles tout au plus, des bûcherons de la forêt d'Iraty Pays Basque affirmaient avoir rencontré ses traces de pas, et d'autres l'avoir entendu, et le souvenir s'en perpétuait encore récemment lors de veillées au coin du feu.

“Deux montagnards l'ont bel et bien entendu, la nuit, dans les rochers, alors qu'ils recherchaient désespérément quelques bestiaux égarés.

Perdus dans la brume, ils s'orientaient en s'appelant avec le cri perçant qu'ils appellent l'irrintzina, lorsque l'un d'eux réalisa que c'était le Basa-Jaun qui l'imitait !”
(Duny-Pétré 1960).

Au soir au coin du feu

Si nombre de récits sont extrêmement mythifiés, de vrais contes fabuleux en fait, il en est qui sont étonnamment réalistes: je n'en veux pour preuve que celui du “Basa-Jaun ou cavolar”, qui mérite d'être cité in extenso.

“ Il était une fois, dans une bergerie, deux bergers. Un soir, après souper, ils mirent des châtaignes à griller dans le feu. Pendant qu'elles rôtissaient, ils se couchèrent un moment car ils s'étaient beaucoup fatigués, pendant la journée, à garder leurs brebis, et le sommeil les surprit.

Un bruit venant de la porte les réveille ; ils entendent quelque chose qui agite le loquet de la porte. L'épouvante les saisit, car ils se disent en eux-mêmes que c'est sûrement Basa-Jaun. Ils demeurent silencieux, ne se parlent pas, et font semblant de dormir.

Ils ne s'étaient point trompés : ils voient entrer un Seigneur Sauvage tout noir et tout couvert de poils. Il s'approche d'eux, et ils sentent une main rugueuse et tremblante leur parcourir le visage. Ils pensent que c'en est fait de leur vie, que le Seigneur Sauvage va les dévorer, et ils sont tellement effrayés qu'ils respirent à peine. Mais non : Basa-Jaun s'installe devant le feu, se chauffe, et retirant les châtaignes de dessous la cendre, il les mange toutes. Tout en mangeant, il regarde de temps en temps, si les bergers s'éveillent. Ceux-ci, morts de terreur, ne bougent même plus.

Le Seigneur Sauvage, après avoir mangé les châtaignes, se leva, prit dans la cabane ce qui lui convenait, et sortit sans faire de mal à personne.”
.

Un conte ? Oui, certes, mais qui a un parfum d'authenticité étonnant : on croirait presque un récit typique du Caucase Russie, tel que Marie-Jeanne Koffmann en a recueillis.

Hommes sauvages

Le folklore sur le “Basa-Jaun” : le “portrait-robot” qu'a tenté d'en faire Duny-Pétré (1960) fait irrésistiblement penser aux néanderthaliens attardés de l'URSS Russie: troglodyte, nocturne, vivant dans les forêts montagneuses, velu, possédant une longue chevelure, ressemblant à l'ours, poussant des cris puissants, se nourrissant de quantité de choses, y compris en commettant des larcins (vols) dans les cabanes de bergers, et cetera, et cetera : la base du conte populaire est remarquablement semblable à quantité de récits recueillis au Caucase Russie notamment (dans ce cas, des témoignages de première main, circonstanciés, de rencontres avec des Hommes Sauvages et velus).

Homme de bouc

Le nom d'“Homme de Bouc” donné au “Basa-Jaun”, évoque la pilosité (velu comme un bouc), le pied montagnard (un vrai “pied de chèvre” !), et sans doute aussi l'odeur fétide (il doit “puer le bouc” !), toutes choses signalées chez les Hommes Sauvages asiatiques. Notons aussi que le Diable des Chrétiens étant figuré avec des caractères de bouc (entre autre le pied), a dû donner base au nom d'iretgge utilisé en Ariège.

Soit dit en passant, il y a une altération manifeste du mythe dans l'est des Pyrénées, ou l'ours, l'hérétique (Maure ? Cathare ?), voire le Diable ont visiblement été surimposés : cela pourrait signifier une disparition plus ancienne des néanderthaliens dans cette partie de la chaîne. A Arles-sur-Tech, les simiots sont affublés de dents fourchues et autres détails fantasmagoriques. De fait, les témoignages les plus récents et les indices matériels les plus probants proviennent tous du Pays Basque ou de l'Espagne. Si les Basques ont pu, par l'isolement de leurs vallées, garder une langue unique (qui s'écarte de toutes les langues indo-européennes), et un patrimoine génétique non moins unique (un très haut pourcentage de groupes sanguins Rhésus négatif) - on pense que ce sont des Cro-Magnon presque purs - alors a fortiori l'Homme Sauvage néanderthalien a pu se maintenir fort longtemps dans les montagnes, en fait jusqu'à la déforestation au 17°-18° siècles…





Néanderthaliens

L'Homme Sauvage et velu de la forêt d'Iraty : tout, chez lui, fait irrésistiblement songer aux Hommes Sauvages de l'URSS : velu comme un ours, agile comme l'isard au point de distancer les chiens (le pied montagnard des Néanderthaliens). Pays Basque Texte normal en noir France “”